Préparation physique

Les 4 piliers de la préparation au combat

Préparation physique et apprentissage technique : les 2 axes principaux généralement utilisés dans la préparation au combat.

L’apprentissage technique se réalise souvent sous la forme de répétitions de techniques ou d’enchaînements codifiés et standardisé. L’exemple type est le suivant : “face à telle attaque, je réponds avec telle défense”. Cet apprentissage réalisé sous forme d’algorithmes à respecter est utile pour préserver une “pureté” des formes. Il auusre également une transmission des techniques traditionnelles dans une logique de transmission d’un patrimoine. Pratiquée de façon exclusive, cette approche n’est pas adaptée à une pratique centrée sur la self défense. En effet, elle omet que la seule certitude du combat réel… c’est l’incertitude.

Incertitude du moment, du lieu, du nombre d’adversaires, de leurs réactions, de notre propre réaction face au stress. Dans un contexte de rue, celui qui s’en sort est celui qui sait gérer cette incertitude. Et non celui qui se contente de répéter des enchaînements standardisés, souvent complexes, dans un environnement sécurisé.

La préparation physique se concentre quant à elle souvent sur le cardio, la musculation et les assouplissements. Mais cette préparation physique laisse fréquemment de côté une approche holistique du corps humain.

Mais c’est deux éléments ne suffisent pas pour une préparation efficiente en matière de combat de rue. Celle-ci doit être plus complète. Elle doit reposer sur un juste équilibre entre quatre piliers complémentaires. Ces derniers sont présentés ci-dessous.

Pilier 1 : créer des automatismes “passe-partout” simples

Les neurosciences nous enseignent deux éléments importants :

  • Tout d’abord, que l’agressé a toutes les chances d’être mis en échec si son cerveau doit choisir parmi un panel trop important de techniques. En effet, le temps de sélection d’une réponse adaptée sera trop long pour bloquer l’attaque.
  • Ensuite, que sous stress, les enchaînements compliqués sont infaisables. En effet, on constate une perte de la motricité fine à partir de 115 battements par minute (bpm) et de la motricité complexe à partir de 145 bpm. Or nous nos battements cardiaques peuvent passer de 70 à 220 battements par minute en moins de 10 secondes sous l’effet du stress. Et bien évidemment, notre capacité à prendre des décisions et notre mémoire seront alors altérées (source : Neurocombat – livre 1).

Dès lors, la seule façon de s’en sortir techniquement lors de situations critiques est d’emmagasiner peu de techniques !!! Par contre il faudra les maîtriser parfaitement. À l’entraînement, l’enjeu sera donc de répéter quelques techniques et enchaînement simples. Cela permettra de créer des automatismes qui ressortiront spontanément en état de stress. L’objectif est de simplifier les réponses en les réduisant au strict nécessaire. Elle deviendront alors des techniques “passe-partout” rapides et polyvalentes.

Cela ne veut pas dire que des enchaînements plus complexes ne doivent pas être étudiés. Ceux-ci seront travaillés pour compléter la connaissance de l’art martial dans sa globalité. L’étude de ces enchaînements techniques (réalisés de façon contextuelle) permettra de s’approprier progressivement une logique de combat (cf. 2ème pilier ci-après). Mais ils ne seront jamais travaillés comme une fin en soi. En effet, ces enchaînements standardisés n’intègrent pas les réactions imprévues de l’agresseur et seraient trop complexes pour être restituées en état de stress.

Pilier 2 : développer sa capacité d’adaptation permanente

Nous ne pourrons jamais étudier toutes les situations à l’entraînement. Et quand bien même nous y parviendrions, le stress du combat nous les ferait oublier. L’enjeu est donc donc de parvenir à générer soi-même ses propres réponses de manière circonstanciée.

Cela n’est possible que si le système de combat est suffisamment flexible et génère spontanément des solutions. Solutions valables y compris (et surtout) sur des situations qui n’auront pas été vues à l’entraînement. Pour y parvenir, la pratique ne doit pas se focaliser sur des enchaînements techniques standardisés, mais sur les principes qui permettent d’y aboutir. Autrement dit la technique doit découler des concepts et non l’inverse. Chacun pourra développer des variations techniques infinies dès lors qu’il comprendra le principe sous-jacent qui y est associé. Mieux vaut se focaliser sur quelques principes logiques. Principes qui donneront les moyens d’avoir une réponse intuitive quelle que soit la distance de combat, debout ou au sol, avec ou sans arme.

J’aime beaucoup ce conte zen dans lequel un vieux chat ayant attrapé un rat explique à un autre chat pourtant plus jeune et plus habile, qui a échoué à attraper le rat, pourquoi, lui, y est parvenu. Le Vieux Chat dit : “ton entraînement a été entièrement axé sur la technique. Tu ne penses qu’à une seule chose, attraper le rat. Les vieux maîtres t’ont enseigné des modèles et des mouvements afin de te permettre de développer une bonne technique. Et même la plus simple des techniques repose sur des principes profonds. Tu te concentres trop sur l’aspect externe de la technique. Cela te fait douter de la tradition des vieux maîtres, et t’oblige à rechercher de nouveaux artifices. Cependant, si tu te reposes trop sur la technique, tôt ou tard tu arriveras dans une impasse, parce que les techniques physiques ont une limite. Médite bien là-dessus.”

Pilier 3 : la préparation psychologique 

Certains systèmes de combat russes (Systema de l’école Ryabco), chinois (Da cheng Quan) ou japonais (Taïkiken) ne comportent pratiquement aucune technique de combat. Ces dernières focalisent l’essentiel de leur approche sur la partie interne. Ainsi, elles axent leur travail sur la respiration, la gestion de la peur et de la psyché en général, la visualisation, le relâchement, la liberté de mouvement.

Ces styles partent du principe que la technique est secondaire. Car la seule constante de tout combat est la capacité à gérer son stress et tout ce qui est lié aux perturbations liées à l’augmentation du rythme cardiaque :

  • Perturbations motrices à partir de 115 bpm (tension des muscles engendrant une altération partielle ou totale de la motricité fine et complexe),
  • Perturbations sensorielles (auditives et visuelles) à partir de 145 bpm,
  • Et enfin, les perturbations cognitives (comportements automatiques, distorsions dans la perception de vitesse) à partir de 145 bpm (source : Neurocombat – livre 1).

Ces caractéristiques justifient les 2 approches que nous utilisons dans notre système de combat :

  • Une approche structurée principalement sur le socle moteur lourd, en y a ajoutant quelques éléments du système complexe. Mais en laissant de côté les techniques nécessitant la motricité fine (tel les clefs articulaires complexes ou les techniques exécutées avec le doigt),
  • Un travail de la psyché de façon à limiter les effets du stress et garder une certaine lucidité lors du combat. Cela se fait par des exercices de respiration, de visualisation ou de désensibilisation progressive à la violence et à la douleur.

Bien entendu, cette approche psychologique doit être menée parallèlement à une préparation physique adaptée.

Pilier 4 : le conditionnement physique

La préparation physique apporte autant de bonnes capacités motrices qu’une sensation de force, d’assurance et de bien être général dont l’utilité dépasse la confrontation physique. Sur ce point, il est important d’avoir une approche globale et systémique du corps humain.

On se focalise par exemple souvent sur le développement musculaire. Celui-ci est important. Cependant, ce sont les tendons (bandes de tissus conjonctifs qui tiennent un muscle à un os et transmettent la force musculaire) et les ligaments (tissus conjonctifs qui relient deux os dans une articulation ou maintiennent vos organes internes en place) qui doivent être plus résistants et tenaces que les muscles. En effet, les muscles se fatiguent rapidement sous stress alors qu’un bon conditionnement des tendons et des ligaments permet de continuer à travailler longtemps après le point de la fatigue musculaire maximale. Conditionnement obtenu à l’aide d’une préparation physique ciblée.

Par ailleurs, si les muscles doivent être travaillés, ils méritent également d’être purgés des tensions qui s’y sont accumulées. Ce travail peut se faire par des massages en profondeur ou des exercices lents qui font appel au poids du corps, associés à la respiration.

Cette approche systémique mérite également d’être menée sur les systèmes respiratoire, cardiovasculaire, immunitaire, etc.

J’aimerais conclure cet article en l’ouvrant plus largement sur les bénéfices d’une pratique martiale centrée sur les 4 piliers mentionnés. Le combat n’est d’après moi qu’une partie de ce que doit apporter un art martial. La pratique doit également apporter santé, satisfaction, renforcement de la volonté et bien être dans une logique de croissance personnelle. Les 4 piliers présentés répond à ces exigences pour une utilité qui dépasse de loin le cadre de la confrontation physique.

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